Diego ? Ma Bible, s’il-te-plaît.
D’habitude, je m’en sers principalement pour réaliser des exorcismes sur les gens qui trouvent que le terme « à la française » mis après n’importe quel concept est synonyme de qualité, mais pour une fois, je vais vous en lire un passage. J’en ai d’ailleurs un exemplaire très complet, puisque dédicacé par l’auteur original. Et si vous ne croyez pas aux dédicaces divines, c’est probablement que vous n’êtes jamais venus aux miennes, mais passons.
Alors voyons voir… ah, voilà.
01 AU COMMENCEMENT, Dieu créa le ciel et la terre.
02 La terre était informe et vide, les ténèbres étaient au-dessus de l’abîme et le souffle de Dieu planait au-dessus des eaux.
03 Dieu dit : « Que la lumière soit. » Et la lumière fut.
Bon, je saute quelques lignes parce qu’on ne va pas se mentir : la Bible, c’est un peu chiant. En plus, tout le monde sait que Jésus meurt à la fin, il y a des spoils plein les églises, c’est infernal. Alors… ah, voilà le passage que je voulais.
24 Et Dieu dit : « Que la terre produise des êtres vivants, qui seront aussi puissants que majestueux, et ils se nommeront « dinosaures ». » Et ce fut ainsi.
25 Pendant un temps, Dieu fut satisfait de son oeuvre. Il la contempla, et son regard se posait partout où les bêtes se mouvaient.
26 Puis, Dieu regarda vers l’avenir, et Dieu vit Jurassic World 2 – Fallen Kingdom.
27 Dieu inventa le bordel, puis la pipe. Ainsi, il put s’exclamer « Bordel de pipe, qu’est-ce que je viens de voir ?«
28 Le Seigneur alla se laver les yeux.
29 Le Seigneur revint de la salle de bain et décida que ça n’allait pas être possible. Il déchaîna la fureur du ciel, puis celle de la terre. Il fit disparaître les dinosaures de la terre, et vit que cela était bon.
30 Dieu dit alors « Bon, on revient au point 24 et vous serez gentil de m’effacer ce passage, je préfère oublier. » Dieu inventa la cuite, et s’en prit une promptement.
Ce passage fort méconnu de la Bible est pourtant central. Vous me direz que ça ne tient pas debout : si Dieu a éradiqué les dinosaures pour empêcher Jurassic World 2 – Fallen Kingdom, comment a-t-il pu échouer malgré tout ?
Et je vous demanderai : avez-vous déjà essayé d’éradiquer des millions de dinosaures avec du savon dans les yeux ? Bon, alors. Laissez à Dieu le droit de se planter un peu. Surtout que techniquement, Dieu étant omnipotent, il peut tout faire. Même des erreurs. Car s’il ne peut pas faire d’erreurs, cela veut dire qu’il y a des choses qu’il ne peut pas faire. Donc, c’est qu’il n’est pas omnipotent.
Ne me demandez pas pourquoi, lorsque j’ai souligné cet aspect lors de mes cours de catéchisme durant ma tendre enfance, je n’ai pas reçu de réponse. Par contre un coup de pied au cul, si. Ah, les mystères de la religion.
Alors, peut-être vous dites vous que ouiiiii holala il exagèèèèère, vas-y, ce à quoi je répondrai deux choses. D’abord, que vous devriez arrêter de faire traîner vos voyelles comme ça, c’est insupportable. Et ensuite…
Spoilons, mes bons !
Notre film débute dans les profondeurs mystérieuses de l’océan. Enfin pas trop profondément quand même, puisque nous suivons un petit sous-marin qui approche d’un endroit bien connu : Jurassic World, dont vous savez tout puisque nous en parlions dans un précédent spoiler.
Et plus précisément, le sous-marin approche… des immenses portes de l’enclos marin du Mosasaure, ou « lézard de la Meuse » (je tenais à le rappeler), la grosse bête sous-marine qui était l’attraction phare de Jurassic World, même si niveau spectacle aquatique, c’était encore un peu limité, puisqu’il fallait combiner plusieurs dresseurs façon Mégazord pour en obtenir un suffisamment gros pour jouer avec le bestiau.
L’enclos du monstre avait donc ses portes spéciales pour accéder à la mer au cas où… heu… un… c’est… attendez, pourquoi il y a des portes géantes à son enclos en fait ? Non parce que le plan, c’était pas justement d’éviter qu’il ne sorte ? Parce qu’il n’y a à peu près aucune raison de vouloir le relâcher en mer, en fait. Alors c’était au cas où il veuille aller en boîte ? Commander des pizzas ? Discuter avec les témoins de Jéhovah ?
C’est complètement con, mais c’est là, aussi faisons avec car nous sommes justes et bons, surtout moi.
Les portes s’ouvrent devant le sous-marin, et celui-ci s’engouffre aussitôt dans l’enclos abandonné. À bord, Jean-Jacques et Jean-Jacques se posent quantité de questions.
« Tu penses qu’il est mort, le mosasaure ?
– Mais oui… comment veux-tu qu’il ait survécu ? Une bestiole de cette taille, dans un enclos sans personne pour le nourrir durant des années !
– Oui mais s’il s’est nourri de la bêtise du script ?
– Ah là, oui, il serait limite en obésité morbide.
– C’est quand même ballot qu’on nous ait envoyés là-dedans sans même vérifier d’abord par sécurité. Une bête observation depuis le ciel et il aurait vite été aperçu, le bousin, dans sa mini-piscine.
– Oui mais c’eut été malin, alors tais-toi et pilote. Et arrête de stresser : c’est pas parce qu’on s’appelle tous les deux Jean-Jacques qu’on n’a pas d’avenir dans ce film. »
Bien sûr que non.
Nos deux sous-mariniers avancent en tout cas dans l’enclos à la recherche d’un précieux butin : le squelette de l’Indominatus Rex, la bestiole débile génétiquement modifiée du dernier film. Et attention : le squelette de la créature est non seulement là, mais il est impeccable.
Alors que je rappelle que le bestiau a été dévoré par le mosasaure.
J’utiliserais bien ma boîte à « ÇA ALORS ! » mais je l’ai enfermée et enterrée pour la durée de ce spoiler, tant elle aurait normalement hurlé à chaque seconde de ce film sans même que je la touche. Je l’entends murmurer sous mes pieds malgré tout, telle une créature lovecraftienne.
Donc, le squelette de l’I-Rex est impeccable. On va supposer que le mosasaure s’est contenté de le croquer, puis de le recracher aussitôt, avant d’aller chercher son couteau et sa fourchette pour délicatement préparer son repas avant de sucer les os tel un mangeur de ribs en goguette. Heureusement, l’équipage du sous-marin n’aperçoit pas l’énorme pot de ketchoupy qui a servi au repas de notre gros ami, reposant par le fond juste à côté.
Jean-Jacques et Jean-Jacques s’empressent de faire ce pour quoi ils sont venus : avoir l’air bêtes, couper un tronçon du squelette, l’accrocher à un ballon avec balise, et laisser le tout remonter à la surface. Puis, le sous-marin s’apprête à repartir quand…
Oh ! ÇA ALO… je voulais dire QUELLE SURPRISE ! Le mosasaure est vivant. Probablement qu’il vivait de pâtes en boîtes et de pizzas depuis des années pour tenir, tel un étudiant de l’UNEF oublié en L1 depuis des années sans que personne ne remarque son existence. Et personne n’a remarqué ces 2500 commandes Domino’s passées ces derniers mois et dont les livreurs ne revenaient jamais. Il est fort, ce mosasaure. Il ne vient pas de la Meuse pour rien.
Pendant ce temps, à la surface, un hélicoptère récupère l’os remonté jusqu’à la surface sans rien remarquer, puis va chercher un technicien resté dans un coin de l’île pour commander à distance les portes de l’enclos du mosasaure. Et qui gueule dans son micro :
« Allô ? Allô, Jean-Jacques et Jean-Jacques ? Ici Jean-Jacques ! Pourquoi vous ne répondez plus ? Je suis en train de vous ouvrir les portes de l’enclos pour que vous sortiez ! Vous en êtes où ? Houhouuuu les amiiiiiiis ? »
Mais alors que l’hélicoptère approche pour récupérer ce Jean-Jacques, soudain, tout le monde aperçoit quelque chose qui approche… le T-Rex ! Le pauvre technicien et ses copains se mettent donc à paniquer.
« HO NOOOON ! POURQUOI EST-CE QU’ON EST VENUS SUR UNE ÎLE AVEC DES DINOSAURES TUEURS UNIQUEMENT AVEC NOTRE SLIP ET PAS UNE ARME ? »
Je ne rigole pas.
Les mecs n’ont même pas un crayon un peu pointu : ils sont venus en slip, et encore, sans élastique, faudrait pas que ça claque au museau d’un dinosaure un peu fort. Parce que bon, hein, il n’y a jamais eu que plein de morts ici, vous venez au beau milieu d’une tempête (oui je sais, ça aussi c’est surprenant) pour une opération pourrie, mais attention, hein, on ne prend pas d’armes. Faudrait pas assurer un minimum la sécurité de l’équipe. La consigne est probablement de péter un peu fort en cas d’approche de prédateurs pour l’effrayer ; personne ne s’attend à une équipe de pétomanes. D’ailleurs, je pense que c’est un hommage à l’équipe derrière le scénario, mais c’est juste une théorie personnelle. D’ailleurs si vous vous bouchez les oreilles durant tout le film et vous contentez de lire sur les lèvres des personnages, vous pouvez presque entendre les bruits de pets lointains et plaintifs de l’équipe du film au moment d’écrire les dialogues.
Enfin, faisons bref : l’hélicoptère essaie de décoller sans se prendre le T-Rex sur la truffe, déroule une échelle pour aider le technicien à les rejoindre, le T-Rex mange un bout de l’échelle mais pas le technicien, hélas, le mosasaure, qui a profité de la porte entrouverte de son enclos pour filer, saute hors de l’eau et mange Jean-Jacques qui pensait s’en tirer alors que hein, bon, Jean-Jacques, soyons sérieux.
L’hélicoptère, lui, va bien, merci, et reprend donc la route tranquillement pour rentrer à la maison loin de l’île balayée par la tempête.
Avançons un peu dans le temps…
Et découvrons que les actualités parlent désormais de Jurassic World, le parc d’attraction abandonné, mais pour une toute autre raison : Isla Nublar, l’île qui l’abritait, a un volcan. Et celui-ci vient de se réveiller.
Or, cela soulève une grande question : d’abord, qui est le con qui a construit un parc sur une île balayée par les tempêtes et avec un volcan en activité ? Et ensuite, plus secondaire, faut-il aller sauver les dinosaures sur place ? Qui sont quand même des dinosaures qui pour un certain nombre ont mangé des gens. Les amis des animaux disent que oui. Les gens qui se souviennent qu’à chaque fois qu’on a tenté un truc avec des dinosaures dans ces films, ça a merdé, disent que non.
La question est donc posée au congrès américain, devant lequel le professeur Ian Malcolm…
Attendez. Aaaattendez une seconde.
Isla Nublar est une île située au large du Costa Rica. Et aux dernières nouvelles, elle n’est pas du tout américaine. L’île a beau être privée, elle appartient quand même à un autre État.
Mais j’imagine que les scénaristes, qui étaient occupées à jouer avec leur caca au moment de l’écriture de ce film, n’ont jamais entendu parler d’un autre gouvernement que celui des Etats-Unis d’Amérique.

« Je ne sais même pas ce que je suis venu faire ici. Je veux dire : dans ce film. Aidez-moi, s’il-vous-plaît. »
Donc, retrouvons le professeur Ian Malcolm, qui témoigne donc devant une commission du congrès américain parfaitement incompétente sur le sujet, pour donner son avis.
« Alors professeur Malcolm, pensez-vous que nous devrions sauver ces dinosaures ?
– Vous savez, le Sénat français est déjà assez bien entretenu, je pense que…
– Non, on parlait des dinosaures de Jurassic World.
– Les… aaaah. Ouiiii, bien sûr. Je… hem. Oui, hé bien non. Les dinosaures ont disparu une fois, bon ben voilà, on a voulu défier la nature et les recréer, la nature corrige le tir. Je propose donc de les laisser crever comme de petites merdes.
– Ce n’est pas très sympa, professeur Malcolm.
– Vous vous souvenez de touuuuus les autres films où à chaque fois qu’on tentait de faire ami-ami avec les dinosaures, ils nous bouffaient ? Bon ben voilà. Vous voulez quoi ? Un autre film avec des enfants énervants, un informaticien pataud, un expert en dinosaures qui court partout mais trouve le temps de faire des bisous, un enchaînement de scènes où on va se taper pour la 130e fois le T-Rex qui intervient piiiiile au bon moment avant de brailler en prenant l’air cool ? »
Visiblement, oui. Car même si la commission américaine finit par annoncer qu’ils approuvent l’avis de Malcolm, quelqu’un n’est pas de cet avis. Et ce quelqu’un, c’est Claire Dearing, la rousse héroïne du précédent film, qui visiblement a oublié celui-ci, car désormais, elle est la présidente d’une association qui milite pour sauver les gentils dinosaures. Tout ça, c’est un gros malentendu, et son on commence à se chamailler autour de qui a tué qui, bon, hein, hé.
Et elle reçoit un super coup de fil d’une certaine fondation Lockwood appartenant à Monsieur Lockwood (c’est audacieux)… l’ancien associé du professeur Hammond, fondateur du premier Jurassic Park ! Et son interlocuteur veut la voir de toute urgence, et l’invite à venir dans sa résidence, qui n’est autre qu’un énorme manoir au milieu des bois. À peine Claire est-elle entrée qu’elle est accueillie par Bobonne, la bonne.
« Monsieur Lockwood va vous recevoir bientôt. Mais d’abord, vous avez rendez-vous avec le gérant de la fondation Lockwood, Francis Rabouin. »
Et un élégant garçon dans sa trentaine de venir serrer la paluche de notre héroïne, de lui dire qu’il adore ce qu’elle fait, qu’il est fan de sa capacité à semer un T-Rex en talons haut (elle, pas le T-Rex), et il lui fait faire le tour du manoir, qui contient une tripotée de salles d’exposition façon musée des dinosaures. Et explique que sous le manoir se trouve le laboratoire où Messieurs Hammond et Lockwood ont ressuscité les dinosaures pour la première fois.
« Wouaw, c’est super fascinant, mais vous savez, dans ces films, à chaque fois qu’il y a une salle avec un gros squelette de dinosaure comme cet énorme crâne de tricératops, c’est toujours là que se passe la scène finale du film, donc dois-je m’attendre à ce que tout se finisse ici ?
– Ahaha je… allons Claire, vous racontez n’importe quoi…
– Ah mais si, je vous jure, c’est super prévisible. Un peu comme la présence d’enfants espièges-mais-en-fait-relous. Vous vous souvenez de Ritalin et son frère ? Je suis sûr qu’on va s’en taper un.
– Vous délir…«
Au même moment, on aperçoit une petite fille qui les espionnait s’enfuir en courant dans un coin de la pièce.
« Vous voyez Monsieur Rabouin ? C’est écrit.
– Je… non, mais c’est juste une coïncidence.
– Arrêtez, personne n’y croit. C’est comme le personnage du riche idéaliste qui aime les dinosaures, il devrait surgir d’une minute à l’autre.
– Que… AH BONJOUR MONSIEUR LOCKWOOD ! »
Et en effet s’avance dans la pièce un vieil homme en fauteuil roulant qui a à la main la célèbre canne dont le pommeau est l’ambre contenant le moustique ayant permis de ramener les dinosaures à la vie.
« Bonjour Mlle Dearing, je suis un vieux et riche idéaliste qui aime les dinosaures.
– Si je m’attendais à ça.
– Si je vous ai fait venir ici, c’est pour vous expliquer que… moi, j’ai décidé de les sauver, les dinosaures de l’île. Accord des autorités ou non. Avec l’aide de Monsieur Rabouin ici, j’ai monté une opération de sauvetage. Nous pensons pouvoir sauver 11 espèces au moins, et les ramener jusqu’à une autre île, où ils pourront vivre libres et en paix. Un véritable sanctuaire. Je ne peux accepter qu’ils disparaissent. Je veux les sauver.
– Une autre île avec un volcan, des tempêtes et peut-être même des tremblements de terre, j’espère.
– Évidemment.
– Vous, vous étiez le genre à sauvegarder votre partie dans Sim City avant de lâcher toutes les catastrophes, vous, gros coquinou.
– Hooooo que oui.
– Mais sinon, je ne comprends pas une chose.
– Pourquoi on a besoin de vous ?
– Non : pourquoi on se fait chier alors que l’on a la technologie pour produire d’autres dinosaures. Que ceux-là meurent, c’est moche, mais en fait, tout le débat sur leur nouvelle extinction n’a aucun sens, n’est-ce pas ? Surtout quand on cause au-dessus du laboratoire qui a permis de les ramener à la vie. Ça me paraît très con, le pitch de ce film, maintenant que j’y pense. Attendez, en plus, il y a d’autres dinosaures sur des îles voisines ! C’était dans les précédents films ! Vous voudriez dire que la réalisation n’a pas regardé les Jurassic Park/World précédents avant de faire ce film ?
– … ah oui, tiens. En même temps, je les comprends un peu. Heu… vous ne voudriez pas plutôt me demander pourquoi on a besoin de vous ?
– Allez, d’accord. Pourquoi avez-vous besoin de moi ?
– Pour deux choses. D’abord, les dinosaures ont une puce pour les pister, vous vous souvenez ?
– Celle dont on ne se servait pas ou presque dans le précédent film, oui ?
– Nous avons besoin de votre empreinte digitale pour réactiver le système au sein du parc et ainsi pouvoir traquer nos cibles plus facilement et mieux envoyer nos chasseurs les ramener.
– Vous savez, j’étais directrice du parc, mais j’ose penser que touuuut le système avait quand même d’autres portes d’entrées que mon empreinte digitale. Histoire que l’équipe informatique ou la sécurité du parc puissent bosser sans mourir même quand j’étais en vacances ou que je pionçais.
– Heu… c’est…
– Je vois. C’est aussi con que le reste. Et la deuxième chose pour laquelle vous aviez besoin de moi ?
– Nous aimerions sauver un raptor en particulier, celui qui s’est montré le plus intelligent jusqu’ici… Blue. Le raptor de votre petit-ami Owen Grady et sa cool attitude.
– Chhhht. J’avais oublié pour « Owen Grady et sa cool attitude » dans le résumé du dernier film. C’est moche ce que vous faites, vous savez ? Mais en tout cas, histoire de complètement sortir des poncifs habituels, sachez que l’on s’est séparés entre deux films.
– Ah je suis super surpris. Monsieur Rabouin aussi, pas vrai ?
– Trop.
– Bon, bref, Mlle Dearing, vous seriez bien urbaine d’accompagner notre équipe là-bas pour cette petite expédition illégale, et de convaincre votre ami Owen de se joindre à nous, car seul lui peut nous aider à capturer ce raptor très malin qui échappe à nos chasseurs. »
Claire essaie d’oublier le kilo d’incohérences et d’âneries qu’elle vient d’entendre et se dit que oui, cette opération illégale a l’air formidable, bougez pas, je vais chercher mon bon ami Owen Grady. Hop, un saut en voiture, et près d’un superbe lac, on retrouve Owen qui vit toujours en caravane parce que c’est l’ami de la nature, voyez-vous, et qui est fort occupé à construire une superbe cabane. Car Owen aimerait vivre ainsi, au milieu des bois, à humer l’air du matin, à voir la rosée étinceler sur les feuilles autour de lui et les vagues du lac danser sous ses yeux chaque matin. Oui, voilà, il se verrait bien là à vivre heureux, avec un petit potager, des réserves de café, et 62 To de porn hardcore et 17 tonnes de sopalin.
Claire vient ainsi interrompre ses travaux et projets, et évidemment, Owen roule des yeux et soupire parce que ouah, pfou, rev’là l’autre qui comprend rien à mon âme rebelle. Les deux se rendent donc dans un rade pourri voisin pour papoter.
Pour rappel, si le film se passait en France, ça voudrait dire que les deux finissent au bar PMU du coin à causer entre Roger qui gratte ses Tac-o-Tac et Michel qui t’explique qu’en France, on a trop de melons, et non, il ne parle pas vraiment d’agriculture.
Mais que se disent-ils ?
« C’est moi qui t’ai plaquée.
– Non, c’est moi, parce que toi tu voulais vivre dans une cabane en caca.
– Non, c’est moi, et c’est très bien les cabanes en caca. »
Pour rappel : personnellement, au moment de me séparer, j’utilise toujours un pelle. Cela évite ce genre de discussions (même si je tiens à dire que mes conversations sont rarement liées à de sombres histoires de cabanes et de caca). Mais, avançons plutôt dans la conversation.
« Owen, le monde a besoin de ta… ta… bordel, ma langue saigne je… ta… cool attitude.
– Voyez-vous ça. Et pourquoi donc ?
– Pour aller sauver Blue. C’est un peu ton bébé.
– Hmmm… non. Je m’en fous.
– Allez quoiiiii !
– J’ai dit non.
– Bon, écoute, demain, un avion va décoller et il y a ton nom parmi les passagers, alors si tu veux venir… »
Et Claire de s’en aller sur ces paroles.
Personnellement, j’aurais été Owen, j’aurais gueulé « Attends, tu vas pas d’abord me dire où est l’avion ? Ou l’aérodrome ? Non parce que comme c’est une opération illégale, je devrais pas trouver les infos sur internet ! »
Mais bon, tant pis. Allons justement voir ce qu’il se passe le lendemain, puisque nous retrouvons Claire sur un aérodrome isolé où l’attend un petit coucou, j’imagine donc que soit le vol dure des plombes et nécessite quantité de pauses ravitaillement pour faire des milliers de kilomètres, soit cet avion est déjà… au Costa Rica.
Ou bien la réalisation d’un film américain merderait sa géographie, mais cela, je n’ose y penser.
Claire embarque, et emmène avec elle Nerd l’informaticien pataud (bravo, vous ne l’aviez pas vu venir) et Geekette, la paléo-vétérinaire reloue (ils voulaient dire « badass » mais en fait, elle passe juste son temps à provoquer tout le monde), et à l’arrière de l’avion, elle trouve… Owen ! Il est venu, ça tombe bien alors !
L’histoire ne dit pas comment il a trouvé l’aéroport, mais vu l’intrigue, plus l’histoire est courte, mieux je me porte.
Le petit avion décolle et… pif pouf, hop, ça y est, on est déjà arrivés !
À chaque fois que vous dites « Je crois en Hollywood« , quelque part, un professeur de géographie meurt.
L’appareil survole l’île à la jungle luxuriante et s’enfonce dans ses splendides vallons, avant d’atterrir sur une piste improvisée près de la côte. La fine équipe peut ainsi descendre rejoindre au sol les mercenaires déjà présents pour sécuriser le coin, ainsi que leur chef, un grand chasseur charismatique au point que lui non plus, je n’ai pas retenu son nom. Il est méchant, c’est un chasseur, appelons le Messire Schmitt.
« Salut les petits gars ! Bon, moi et mes troupes, on s’occupe d’évacuer les animaux. Vous, votre boulot est simple : activer le système de puces de traçages du parc, retrouver Blue et on se charge du reste.
– D’accord. Mais je peux vous poser une question ?
– Bien sûr Owen.
– Pourquoi vous n’avez pas installé votre base à l’ancien quai directement ? Celui à côté du parc ? Pour pouvoir profiter des installations ? Et devoir aller moins loin pour avoir accès aux ordinateurs ou autres ?
– Ho. Heu… parce que c’était… marrant ?
– Je vois. Bon allez, en route les mecs, on se met au boulot ! »

Messire Schmitt et ses amis, les légendaires types qui poussent des cris mais ne tirent jamais lorsqu’un dinosaure leur fonce dessus.
Owen, Claire, Nerd, Geekette et Messire Schmitt montent donc dans un véhicule blindé, et le petit convoi s’ébranle pour traverser l’île. Il passe au beau milieu des restes de Jurassic World, et on arrête le véhicule pour profiter de la vue, car un dinosaure approche et aussitôt, Geekette descend comme une débile pour voir ce que c’est.
J’espère secrètement que c’est le T-Rex.
Mais non, nous sommes dans Jurassic Park : quel est le premier dinosaure que tout le monde voit passer d’entrée de jeu en levant les yeux et faisant « Ouaaaah ? » le diplodocus, bien sûr !
Mais pourquoi ça ne pourrait pas être autre chose ? Je ne sais pas, moi, un sauropelta ? Un spinosaurus ? Hitomi Tanaka ?
Maintenant que le diplodocus et la scène clichée sont passés, nos héros remontent dans leur camion, personne ne fait remarquer à Geekette que c’était stupide de sortir courir sans protection en zone hostile (remarquez, pas plus que d’envoyer des techniciens en slip dans le parc au début du film), et le convoi s’enfonce dans la jungle jusqu’à un ancien bunker abritant des ordinateurs en étant de marche. Hop, Nerd sort son petit portable, lance piratage.exe, et tout s’ouvre. Il réactive le circuit informatique du parc, et avec la petite mimine de Claire, hop, réapparaissent sur les écrans les emplacements de tous les dinosaures du parc.
« Wouah, c’est super pratique.
– N’est-ce pas, Messire Schmitt ? Avec ça, aller récupérer les animaux à sauver va être un jeu d’enfant.
– C’est vrai. C’est bien ces puces GPS. D’ailleurs, puisque c’est du GPS, on aurait pas pu le réactiver depuis les Etats-Unis, ce système, et simplement nous envoyer les données en direct ?
– Bien sûr que si puisque… ho. Hoooooo. Vous voudriez dire qu’en fait, on n’avait aucune raison de venir sur cette île avec le volcan sur le point d’exploser ?
– Ah ben oui, tenez. »
Faisant fi de ce léger détail, nos héros décident de se diviser en groupes : Claire et Nerd vont rester dans le bunker à surveiller les écrans, le tout sans aucune protection parce que ce serait intelligent, quant à Owen et Geekette, eux vont aller, accompagnés des mercenaires, à la poursuite de Blue, dont on connait désormais la localisation.
Pour mieux approcher le raptor en paix, Owen décide de s’avancer en éclaireur, le tout bien évidemment, sans demander à Claire si au hasard, il n’y aurait pas d’autres animaux autour prêt à lui grignoter le cucu. Claire ne pense pas non plus à en parler, à localiser les carnivores, ou à se rendre utile de manière générale, en fait elle regarde juste les écrans en faisant des bruits de bouche tout en bavant sur son chemisier.
Merci d’être venue, Claire.
En attendant, Owen, protégé par le pouvoir mystique d’un scénario qui ne repose que sur la chance impossible des héros, voit Blue enfin apparaître. Le raptor approche son ancien maître avec prudence, après avoir été abandonné, mais avant qu’il ne puisse lui faire la fête voire tenter de s’accoupler avec son pantalon (une scène qui manque grandement et qui irait à la perfection avec le niveau général du film), Messire Schmitt déboule de derrière un fourré avec ses hommes et envoie du pruneau tranquilisant au raptor. Qui aime moyennement, hurle, saute sur un soldat, et a le temps de l’éborgner, provoquant l’ire du mercenaire qui tire donc un coup de pistolet dans le bidou de Blue.
Blue est blessée, mais vivante. Et tranquillisée, pour sûr.
« Bande de margoulins ! » s’exclame Owen « Vous avez tiré sur mon raptor alors que j’avais la situation bien en main ! J’avais même mis son pantalon préféré exprès pour…«
« Taggle« , lâche laconiquement Messire Schmitt en tirant une fléchette tranquilisante sur Owen. Qui s’effondre lamentablement au sol. Geekette est outrée, mais les mercenaires qui sont en fait très méchants lui expliquent le topo : elle, ils l’embarquent. Car après tout, elle est là pour faire la vétérinaire, non ? Elle doit maintenir Blue en vie, car le plan est de la ramener vivante.
Tout le monde se barre donc, en laissant Owen à son sort.
Hmmm oui, certes ? Mais sinon, il ne pourrait pas vaguement servir après ? Du genre pour faire obéir Blue ? Non ? Bon ben très bien. On va donc le laisser mourir là parce que… HONHONHON ON EST TROMÉCHANTS !
Quid de Claire et Nerd ? Hé bien eux n’ont rien suivi de tout cela, et alors qu’ils sont occupés à baver, le sol tremble sous leurs pieds, car le volcan de l’île s’apprête à exploser ! Holala, dites-voir, c’était pas un peu con de venir en pleine éruption, en fait, non ?
Le sol se fend, et les portes du bunker se ferment en urgence. Nerd doit travailler comme un fifou pour ouvrir une nouvelle issue de force via le système informatique, mais pas de chance : comme Claire continue à baver en faisant des bruits de pet avec la bouche, elle a oublié de regarder sur les écrans si au hasard, au même moment, il n’y aurait pas un gros dinosaure méchant dans le secteur.
Et en fait, si.
Un grand dinosaure carnassier dont vous ne me demanderez pas le nom, tant mes lecteurs les plus fidèles savent que je suis plus formé à l’archéologie qu’à la paléontologie, se pointe, et comme nos héros ont décidé que prendre des armes, hihihi, c’était trop nuuuul, hé bien ils sont dans la mouise. Vont-ils le repousser en lui lançant des boulettes de rien ? Ou bien essayer de l’amadouer en faisant la chenille avec lui ?
« Vite, scénario moisi qui nous donne une moule digne du bassin d’Arcachon, aide-nous ! » prient nos amis.
Et paf, figurez-vous que le volcan envoie une coulée de lave droit vers le bunker… et qu’elle commence à s’écouler dans celui-ci par des fissures. Et cette lave tombe pile sur le pauvre dinosaure qui en prend sur la truffe et… heu… grogne un peu ? Mais va bien ?
Attendez, on parle de lave, là, pas de soupe à l’oignon, non ?
Hé bien visiblement, non, puisque le dinosaure a un peu chaud, mais ça va, merci, il n’est même pas blessé. Il peut donc courser nos héros, qui ont simplement mis cette brève diversion à profit pour filer par une autre issue. Ils ferment la porte derrière eux, et s’enfuient, poursuivis par la coulée de lave brûlante-mais-pas-trop.
Et Owen, me direz-vous ?
Lui se réveille de sa sieste chimique pour découvrir qu’effectivement, dans son coin aussi, il y a une coulée de lave qui a très envie de lui faire des bisous. Encore tout engourdi, il a du mal à bouger, il prend donc des postures bizarres (hihihi, c’est rigoloooo), avant de se relever en pleine forme et de courir comme un dieu, alors que deux secondes avant, il ne sentait plus ses jambes. Ouvrez-vous, cieux, chantez, angelots : c’est un miracle.
Dans l’affaire, sachez-le, la lave s’approche si près alors qu’il est par terre… qu’un de ses doigts la touche.
Et non, il n’a même pas une brûlure, il fait juste « Ouillouillouille ! » parce que vous savez, la roche en fusion, ça n’est rien comparé à un didi d’Owen. Sûrement un effet secondaire de sa cool attitude.
Ah ben tenez, moi ce sont mes doigts qui fondent en tapant ces mots. Comme quoi.

Voilà voilà. Il pleut de la roche en fusion, mais personne n’a l’air trop dérangé. Tout cela est très surfait.
Owen cavalcade, et parce que l’île est minuscule et qu’à ce rythme, les géographes disparaîtront avant les dinosaures, en deux secondes, il se retrouve à courir avec Claire et Nerd qui fuient le volcan en train d’exploser, ainsi que le nuage de cendres brûlantes qui va avec.
Enfin, brûlantes : lorsque le nuage engloutit nos héros… ça ne leur fait strictement rien. Owen se retrouve brièvement pris dedans, et il n’est même pas un peu sale. Non non, merci, il est encore bien coiffé, avec les dents blanches, et une peau impeccable. Il est fort cet Owen !
Rappelons que les vulcanologues qui me lisent le savent : à proximité des volcans, si on porte des tenues moches qui brillent c’est juste par hommage au disco, aucun rapport avec de petits soucis de températures qui picotent.
Alors, amis scénaristes, petit truc : les dangers, dans un film, si ça n’est pas dangereux, c’est juste tout nul. Non parce que là, j’ai vu des vidages de sacs d’aspirateurs plus excitants.
J’espère que tout le monde sait qu’un volcan, c’est vaguement plus dangereux.
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An 79 de notre ère, Pompéi.
« Décurion Owenus Coolus ! Vite, vous devez aider les citoyens à gagner les galères !
– Ahaha, c’est bien les civils, ça ! Paniquer à la première montagne qui explose. Écoutez, je connais très bien la situation : vous voyez l’espèce de vase enflammée qui arrive vers nous ? Bon, on va faire un barrage avec nos doigts.
– Nos doigts ? Mais décurion, cela brûle tout sur son passage !
– Et gnagnagna, ma soupe est trop chaude, gnagnagna mes petits didis… allez, on met ses doigts ! Les doigts sont la matière la plus résistante de l’univers : la preuve, je les mets partout et…
– Oui, en fait décurion, on n’a pas envie d’en savoir plus. Mais regardez ce nuage de cendres qui arrive ! Il va nous engloutir !
– Hohoho, Môssieur a peur pour sa petite toge ? Ça, c’est de la poussière, ça ne va pas vous tuer. Allez, maintenant, vous arrêtez de faire votre chochotte et vous venez m’aider à repousser la roche en fusion là-bas avec les doigts, j’ai dit.
– Je… bon, les mecs, je crois que le décurion est con. Je propose de lui mettre un banc sur la gueule pour lui apprendre.
– Les bancs sont en pierre, ici, citoyen.
– Justement, bougez pas. »

Le décurion Owenus Coolus, tel que récemment retrouvé.
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En tout cas, Owen, Claire et Nerd courent jusqu’à un coin où ils trouvent une ancienne grosse boule transparente qui servait de véhicule pour visiter le parc en sécurité au plus près des dinosaures. Claire et Nerd ont à peine le temps de prendre les deux seules places à bord que débarque… un allosaure !
Ce grand carnassier, nommé ainsi après qu’il ait été découvert par une certaine Nabila, a bien envie de croquer Owen qui lui est à l’extérieur du véhicule. Heureusement, et comme à chaque fois que tout est perdu…
Ho ben dites voir, le T-Rex débarque, croque l’allosaure, puis rugit en prenant une pause à la cool.
Je sais pas : faites directement un film sur le T-Rex, à la fin. On gagnera du temps. Et puis les dialogues seront forcément meilleurs.
Nos héros, eux, se ruent vers la falaise voisine pour échapper au nuage de cendres qui décidément, n’est pas pressé. Claire et Nerd tombent dans l’océan et commence à couler dans leur bulle blindée, mais Owen, toujours à l’extérieur, tente de les aider en plongeant et en tirant au pistolet sur la coque.
Or, deux choses : un tirer sous l’eau, c’est pas super, la poudre aime moyennement, et ensuite, le SEUL truc qu’on savait au sujet de ces boules dans le précédent film, c’est qu’elles résistaient à des tirs de PISTOLET.
Il y avait UN truc à savoir et ils arrivent à le rater… puisque ça fait des trous. Alors qu’en plus, dans l’eau, sachez-le, une balle, ça part pas bien vite. Je le sais parce que la dernière fois que j’ai eu un contrôle fiscal, j’ai emmené le type en mer et… je… non, rien en fait.
Poursuivons.
Finalement, et puisque c’est n’importe quoi, Owen se contente de forcer l’ouverture avec son petit couteau, et tout le monde peut regagner la surface en paix et regagner la plage la plus proche, où ils respirent enfin à plein poumon sous la végétation luxuriante qui…
Attendez ? Mais et la lave ? Et la tempête de cendres ? Pourquoi tout n’est pas tout gris ? Que ? Attendez… non ? Si ? Si.
Mesdames et Messieurs : la réalisation vient d’oublier qu’elle venait de faire péter tout un pan du volcan, et toutes les scènes d’avant : tous les décors sont comme s’il ne s’était rien passé.
Comme faux raccord, ça se pose là. Un peu comme si vous regardiez un film sur Hiroshima, et qu’après le largage de la bombe, les gens sortent des abris pour trouver la ville intacte.
Ça vous paraîtrait mériter des torgnoles ?
Quelqu’un a préféré donner 170 millions de dollars pour cette erreur. Pensez-y.
Mais vous voulez encore plus de n’importe quoi : nos héros ont atterri, alors que l’île fait des kilomètres, pile à côté du camp des mercenaires ! Hé bien, ça valait le coup de se déplacer en transport blindé en sachant que deux minutes de course suffisaient.
Les mercenaires sont justement en train d’évacuer les derniers dinosaures capturés, y compris par hélicoptère, parce que définitivement, voler près d’un volcan en éruption, c’est facile.
D’ailleurs, eux aussi ont un camp impeccable et tout propre. Apparemment, la tempête de cendres a fait un détour en les voyant. Mais tout de même, ils sentent que tout va bientôt péter, aussi ils finissent d’embarquer sur leur navire aussi vite que possible, puis dégagent. Nos héros ont juste le temps de voler un camion abandonné pour foncer à fond les ballons jusqu’au bateau qui partait, sauter (mais oui) sur la rampe encore ouverte, et se glisser à bord. Où ils se cachent parce que visiblement, les mercenaires avaient bien envie de les laisser mourir sur l’île.
Ce qui n’aurait pas du tout attiré l’attention, bien sûr.
« Vous avez noté ? La présidente de l’association de sauvegarde des dinosaures a mystérieusement disparu. C’était d’ailleurs l’ancienne directrice de Jurassic World. Et son ex-compagnon aussi. La dernière trace que l’on a d’eux, c’est un appel d’un certain Francis Rabouin à la dame. »
Personne ne remontera la piste.
Mais revenons au bateau.
Alors que tout le monde regarde l’île être engloutie par l’explosion finale du volcan, et ses cendres qui engloutissent tout, y compris le dernier dinosaure (qui est mon ami et bien plus encore ; hop, vous l’avez dans la tête, ne me remerciez pas), qui sur le quai, regarde le navire s’éloigner en meuglant ce qui doit être l’équivalent de propos relatifs aux mamans, à l’obésité et à la spéléologie rectale en langage dinosaure. Il est bientôt englouti par le déluge de cendres, et disparaît.
La cendre s’arrête cependant dès qu’elle voit la mer, puisqu’elle ne sait pas nager, c’est connu, et le navire s’éloigne ainsi sans aucun souci.
En cas d’explosion volcanique, n’oubliez pas : mettez les pieds dans un bac d’eau, la cendre n’osera pas s’approcher.
Quelque part, j’ai envie de suggérer que bon, si c’est pour faire de la lave qui ne brûle pas, de la cendre qui ne tue pas, et une explosion qui ne secoue pas, si vous remplacez le volcan de ce film par un cookie d’Enjoy Phoenix, vous avez quelque chose de limite plus dangereux.
Je vais me servir un brandy. Non Diego, pas un verre : la bouteille. Merci.
Tenez, faisons une pause et allons plutôt voir ce qu’il se passe pendant ce temps à la résidence Lockwood, des fois que ce soit un peu moins nul.
Car au sein de celle-ci, nous découvrons qui est la délicieuse enfant espiègle de la maison : Reloue, la petite fille de Monsieur Lockwood. Sa mère est morte lors d’un accident de voiture (elle est tombée dans un trou du script), aussi il élève Reloue avec l’aide de Bobonne.
Et Reloue, vous serez étonné de l’apprendre est espiègle (je n’en puis plus, tant d’inventivité, c’es trop). Et passe son temps à courir partout et à en savoir bien trop sur tous les sujets pour être crédible. C’est bien simple, dès qu’elle apparaît à l’écran, j’entends la voix fluette de mes cartouches à sanglier qui m’appellent.
Reloue court donc partout, jusqu’au moment où elle tombe sur Monsieur Rabouin, qui est occupé à piloter l’opération sur l’île à distance. Donc quand Reloue se pointe, il lui dit qu’il est occupé. Elle insiste et… IL LUI CRIE DESSUS.
Cet homme vient de sceller son destin : quand on crie sur un enfant de film américain, espiègle qui plus est, soit c’est pour s’excuser dans la foulée et montrer qu’on est un mauvais adulte qui cherche la rédemption, soit c’est pour montrer qu’on est vilain. Or, les vilains, ça a une fâcheuse tendance à mourir. Et Rabouin ne s’excusant pas… vous m’avez compris.
Reloue décide d’espionner Rabouin parce que… parce que, et découvre ainsi son odieux plan : il a menti à Lockwood. Il a utilisé son argent pour récupérer les dinosaures, certes, mais pas du tout pour les emmener sur une autre île. Il les ramène ici, pour les vendre lors d’enchères illégales à des acheteurs venus du monde entier ! Il a déjà toute l’installation prête pour accueillir les bestioles, puisque rappelons qu’il y a sous le manoir un laboratoire… où travaille le Dr Wu, ancien généticien de Jurassic World ! Et qui travaille main dans la main avec Rabouin. C’est même lui qui veut récupérer Blue, car il veut ce raptor pour… pour…
Ho non. Non, pas encore. Pitié.
« Pour créer un nouveau dinosaure encore plus dangereux et le vendre comme arme.«
Mais bon sang, les dinosaures, c’est nul comme arme ! À l’ère des drones, vous comptez sur un poulet géant pour arrêter des balles et des missiles ?
« Oui mais toutes les armées du monde ont utilisé des animaux pour la guerre… » justifie Wu pour le spectateur qui n’est pas déjà en train d’essayer de s’étouffer en mangeant ses poings en voyant le retour de l’intrigue pourrie du précédent film.
Bien sûr que les armées du monde entier ont utilisé des animaux. Et puis elles ont toute découvert que dès que possible, il fallait s’en débarrasser parce qu’il y avait bien mieux. On utilise beaucoup moins de chevaux pour tracter nos canons, les chiens antichars, les Russes se souviennent que c’était con, et les chauve-souris kamikazes, les Américains en ont encore un brûlant souvenir. Si vous ne voyez pas de quoi je parle, je connais un type qui fait de formidables conférences historiques.
Mais Wu, lui, ne connait pas tout cela. Les drones, les véhicules, les armes modernes, ça ne lui parle pas. On peut donc le dire : le Dr Wu continue à voyager dans le passé.

Le Dr Wu, l’homme qui veut absolument faire des armes qu’il faut nourrir, qui paniquent sous les bombes, mangent leur alliés et se font les griffes sur le canapé du général.
Reloue, elle, arrive à se faufiler partout sans souci et à tout découvrir. Elle essaie bien de prévenir son papy que les dinosaures vont arriver cette nuit-même ici et être vendus dans les sous-sols au lieu d’être remis en liberté, mais celui-ci est tout vieux et se contente de lui demander de fermer sa bouche, il aimerait dormir, merde alors, il est tard, va te coucher, et dit à Bobonne que ma poche est pleine à craquer, j’aurais pas dû manger ces tacos.
Cela dit, il reste un mystère que même Reloue ne peut pas résoudre. Oui, même elle ignore la réponse. Je vous l’expose comme tel :
Si Rabouin pilotait la mission à distance un peu plus tôt, et que les dinosaures vont arriver au manoir Lockwood cette nuit, est-ce que quelqu’un peut m’expliquer comment un bateau chargé ras-la-gueule de dinosaures va pouvoir faire plus de 6 000 kilomètres du Costa Rica à la Californie en quelques heures seulement ?
Deux options : soit la réalisation a définitivement un gros problème avec la géographie et continue à penser que le Costa Rica est en fait un état américain voisin de la Californie (ça expliquerait beaucoup), soit le bateau est équipé d’un moteur à caca, et vu ce qui tombe, je pense que c’est un peu le Concorde des vagues.
Pour des besoins de crédibilité, nous voici donc réduits à supposer que la propulsion fécale est la meilleure option. Voilà qui résume bien où nous en sommes de ce film, qui creuse tellement qu’effectivement, il va falloir des paléontologues pour le retrouver.
Au manoir Lockwood, en tout cas, Rabouin finit par surprendre Reloue. Comprenant qu’elle en sait trop, il n’hésite pas et… heu… l’enferme dans sa chambre. D’accord. Quelle sanction, dis voir. Puis, il apprend que Monsieur Lockwood veut le voir. Monsieur Lockwood qui voulait pioncer il y a deux minutes se dit qu’en fait, allez hop, on va régler ça. Viens dans ma chambre, coquinou.
Et Rabouin avoue tout.
« Mais Rabouin ? Bon sang, je vous faisais confiance ! Et vous, vous allez vendre les dinosaures gentils ! Espèce de monstre ! Alors que moi et Hammond, on les mettait en cage pour faire du fric, ce qui n’a strictement rien à voir ! Allez, prenez mon téléphone.
– Pardon ?
– Oui, je suis tout vieux, alors soyez sympa, appelez la police et dénoncez-vous tout seul. »
Le mec demande au méchant d’appeler la police pour demander à ce qu’on vienne l’arrêter. Tranquille.
Vous nous dites si on vous emmerde, hein.
Visiblement, Rabouin a dû entendre mes pensées, car comprenant que c’est idiot, il décide d’en finir avec les dialogues de Lockwood : il prend un coussin, et hop, le combinant avec pépé, il obtient un nouveau fossile, encore un peu chaud, mais quand même. Adieu pépé Lockwood, tu étais trop bête pour vivre plus longtemps.
Ce qui tombe bien parce que sinon, j’imagine bien comment ça se serait passé si le plan de Francis Rabouin s’était déroulé sans accroc.
« Alors Rabouin, ça va ? Non parce que j’ai entendu des bruits bizarres dans le sous-sol. Comme s’il y avait des dinosaures.
– Des dinosaures dans le sous-sol ? Hohoho, allons Monsieur Lockwood.
– ROAAAAAAAAAAAAAAAAAAAAAAAAR !
– Vous avez entendu ? On aurait dit un T-Rex.
– Je… heu… non ? C’était mon ventre je… houlala, je bois trop de lait, je digère super mal Hihihi !
– Vous êtes sûrs que vous n’êtes pas en train de tenir une vente aux enchères illégale sous mes pieds en pensant que je ne vais pas remarquer, hein ?
– GROGROGROOOOOOOOOR !
– Holala, hihihi, pfou, ho j’ai super mal au ventre ! Vous devriez voir mon slip Monsieur Lockwood, on dirait l’intrigue de ce film ! »
Alors vous me direz que peut-être, il avait prévu de tuer Lockwood depuis le début. Même si là, ça a l’air d’être une décision complètement improvisée, mais mettons : personne n’aurait fait le rapprochement entre un mec qui devient multimillionnaire en une nuit, pile la même que celle de la mort de son multimillionnaire d’employeur ?
Quel plan subtil. Je n’en puis plus, mais au moins, maintenant, je le sais dans les écoles de scénaristes, il y a une classe SEGPA, et on lui a donné carte blanche sur ce film.
Tenez, c’est tellement bien que je propose de retourner à bord du Turbo-étron, qui n’est pas le sous-titre de ce film, mais le nom du navire où sont retenus les dinosaures pour des raisons qui ne vous échappent pas.
À bord, Owen, Claire et Nerd parviennent à se faufiler hors de leur camion sans se faire repérer pour gagner un autre véhicule où à l’arrière se trouve Geekette, occupée à soigner Blue ! Geekette qui explique que Blue a besoin d’une transfusion. Et en bonne scientifique, elle explique précisément ce dont elle a besoin :
« Le sang d’un autre carnassier. À trois doigts.«
Le don du sang, ça marche donc comme ça : si ça a autant de doigts que toi et que ça mange à peu près pareil, c’est bon, c’est plié. Du coup, puis-je donner mon sang à un vegan ? Les gens ayant un doigt en plus ou en moins sont-ils condamnés à mourir ?
Comment ? Vous dites que le don du sang, ça serait un poil plus technique ? Qui est ce Rhésus dont vous parlez ? Est-ce lui qui changea le A+ en B- et qui a fini crucifié durant un don de plasma un peu festif ?
Bien bien bien.
Si vous allez voir ce film avec un ami du secteur médical, préparez-vous à tirer sur votre ceinturon pour l’attacher, sinon il va se trancher les veines et hurler « J’ai 5 doigts et on a mangé la même pizza, vas-y, ouvre-toi les veines aussi et on échange« .
Mais attendez, ce n’est pas fini ! Car Geekette, la paléo-vétérinaire… nous explique qu’elle ne sait pas spécialement trouver une veine (les vétérinaires, soyez forts en lisant ces lignes), et que bon, quelqu’un d’autre devra aller chercher le sang. Qui sait trouver une veine sur un fucking dinosaure ?
« Une fois, j’ai aidé au don du sang« , nous explique Claire.
Ah ben oui, c’est complètement pareil que de piquer un dinosaure, dites-voir. Je t’en prie Claire. Ho, et devinez qui est le dinosaure compatible le plus proche parmi tous ceux dans les camions chargés dans le bateau ?
Le T-Rex, bien sûr !
Attendez, le T-Rex… il n’y en avait qu’un sur l’île, dans mon souvenir. Et on l’a vu sauver les miches d’Owen au moment où le volcan commençait à péter. Alors à quel moment les mercenaires ont-ils réussi à le capturer ? Ils lui ont fait signe de venir en lui disant qu’il avait gagné un iPhone gratuit ?
Diego ? Puisqu’on parle de don du sang, tu vas me mettre le brandy en perfusion s’il-te-plaît, parce que là, je ne sais même plus par quel bout prendre ce film sans me salir les doigts.
Claire et Owen se faufilent dans la cage du T-Rex endormi et attaché, il se réveille au mauvais moment, remue, mais hop hop, pirouette cacahuète, le duo de choc parvient à pomper du sang au dinosaure sans que les 155 mercenaires autour du camion ne remarquent rien de suspect, et ils peuvent retourner le filer à Geekette qui peut ainsi opérer Blue, extraire la balle, et hohoho, hahaha, tout est bien qui finit bien.
Et Blue vit très bien de se faire tripoter le bide sans anesthésie, merci.
Le bateau, usant donc d’un raccourci dans le script, arrive cependant bientôt à quai, à savoir sur l’embarcadère privé qui jouxte la demeure Lockwood. Les camions en descendent tranquillement, avec leurs dinosaures à bord, pour aller décharger tout ça au laboratoire sous le manoir.
Mais pour nos héros, la situation se complique.

Le T-Rex anesthésié, au moment où il se réveille et le premier truc qu’il voit, c’est la plus grosse incohérence d’Avengers – Infinity War.
Car ce gros nerd de Nerd se fait gauler par les mercenaires au moment de débarquer. Et pour s’en sortir, doit faire semblant d’être membre de l’équipage civil du bateau, ce qui est vachement crédible, mais les mercenaires sont forcément tous bêtes, sinon, ils feraient autre chose de leur vie, comme EHESS. Il est donc emmené manu militari pour aider aux tâches de débarquement.
Owen, Claire et Geekette eux tentent de descendre avec leur camion, et Blue à l’arrière, mais avant qu’ils ne puissent filer… Messire Schmitt leur tombe dessus. Il garde Geekette pour soigner Blue et la tenir à l’œil, par contre, Owen et Claire sont enfermés dans une cage dans le sous-sol du manoir. C’est bête.
Pendant ce temps, les invités de la vente aux enchères arrivent, et tout le monde se prépare pour cette opération illégale montée avec les pieds où tout se fait à la dernière minute, ce qui est très crédible. Des gens bien habillés attendent paisiblement qu’on fasse entrer les cages dans lesquelles sont des dinosaures, et les achètent pour quelques millions, qu’importe les raisons : passion des bestioles, envies de chasses originales, paléozoophilie, ou évidemment… pour en faire des armes.
Non, sans rire, arrêtez avec ça. C’est nul. Stop.
Alors que les enchères vont, vous pensez bien que nos héros eux ne restent pas inactifs. Owen a repéré que dans la cellule voisine de la leur, il y a un Grosstêtausaurus, un dinosaure avec le crâne dur. Comme cela tombe bien, décidément ! Owen le provoque en lui disant qu’il trouve que ce film est très précis scientifiquement parlant.
Le dinosaure, qui n’est quand même pas con à ce point-là, devient tout fou et se met à donner des grands coups de sa grosse tête contre le mur. Jusqu’à faire céder celui-ci et ainsi entrer dans la cellule de nos héros. Puis, avec quelques manœuvres supplémentaires et propos sur l’excellence des dialogues, il rend le dinosaure si ivre de rage qu’il fait aussi sauter la porte de la pièce.
Car non, personne n’avait pensé à enfermer le Grosstêtausaurus dans un coin du souterrain où les cellules lui résistent. Et les gardes ?
Haha. Hahaha. Ha.
Il n’y en a pas.
Oui, vous avez bien lu : les animaux les plus dangereux du monde sont en train d’être négociés lors d’une vente aux enchères illégales avec des marchands d’armes, mais il n’y a même pas un gugusse de la sécurité pour vérifier que ça se passe bien dans les sous-sols.
Arrêtez je… pourquoi ? Pourquoi faites-vous ces films ? Qui es-tu, Hollywood ? Quels sont tes liens avec Satan ? Que l’on me passe mon épée bâtarde, mon heaume, et ma cape du Temple : je crois que j’ai trouvé la bouche de l’Enfer. Tout cela est bien trop mauvais pour être innocent. On nous cache des choses.
Owen et Claire, eux, se retrouvent libres, alors que le Grosstêtausaurus erre dans les sous-sols à la recherche d’une sortie pour quitter ce film.
Mais au même moment, dans les étages supérieurs… dans sa chambre tout en haut de la plus hauuuuute touuuuuur (le film est décidément subtil je vous dit), attend Reloue, qui est enfermée. Mais Reloue a bien évidemment la science du crochetage de serrures, et sitôt libérée, elle s’empresse de courir partout dans le manoir (où il n’y a toujours aucun garde, c’est fabuleux !) pour rejoindre la chambre de son papy.
« Papy, papy, tu dois agir, vite, Rabouin est un rabouin, c’était si peu prévisible ? Papy, tu es tout bleu ? C’est un cosplay des Schtroumpfs, c’est ça ? »
Mais non : vu la qualité du scénario, ce serait plutôt Avatar. Et de toute manière, pourquoi est-ce que je vous dis ça ? Papy Lockwood est mort. Reloue est triste, mais s’empresse de tirer de sous les doigts de son pépé mort l’ultime livre qu’il lisait, celui qu’il gardait près de lui chaque nuit… un album de photos de famille.
Où Reloue note qu’il y a quand même plein de photos d’elle. Ou de quelqu’un qui ressemble vraiment beaucoup. Bon, c’est pas grave, pour l’instant, elle va plutôt sauter dans le passe-plat qu’il y a dans la chambre de papy et qui mène… droit au laboratoire secret souterrain !
Ben oui. Des fois que quelqu’un ait faim, c’est important de laisser un énorme accès non-surveillé. Reloue y file donc, et se retrouve nez à nez avec Owen et Claire ! Qu’elle prend d’abord pour des méchants, avant de reconnaître Owen.
« Tu… tu es le dresseur de Blue ? Je le sais parce que quand j’ai espionné Rabouin dans le laboratoire plus tôt dans le film, il y avait un ÉNORME ordinateur dont la marque était bien affichée, avec une ÉNORME vidéo prête à jouer et un ÉNORME bouton play à presser qui n’attendait que moi, comme si un scénariste neuneu avait voulu trouver un moyen de me filer toutes les infos dont j’avais besoin pour savoir que tu es gentil, et que Blue aussi ! »
Arrêtez, petites balles à sanglier. Arrêtez de m’appeler, je ne vous entends pas.
Claire, Owen et Reloue font donc bien évidemment équipe, et eux sont là « Oh oui, tu voudrais être notre amie ? » car même en danger de mort, il ne faut jamais oublier d’être cucu la praline. Mais à présent, comment se tirer de ce mauvais pas ? En demandant à Reloue où trouver un téléphone ? En commençant par mettre les voiles ?
Non : en faisant du caca, bien sûr.
À commencer par aller espionner la vente aux enchères qui se tient un peu plus haut. Et ce, via les différents conduits qui permettent d’aller espionner le coin sans problème, comme dans tout film nul. Les héros peuvent ainsi y voir que les dinosaures se vendent bien, et à chaque fois qu’une cage défile devant le public, les millionnaires présents se l’arrachent.
C’en est à se demander pourquoi ils n’ont pas eux-même envoyé des contrebandiers chopper du dinosaure sur l’île en détresse.
Mais Rabouin et l’animateur des enchères (qui est évidemment petit, moche et l’air fourbe) proposent soudain une petite pause en amenant une nouvelle cage devant les acheteurs : celle d’un nouveau dinosaure, le Bullshitosaurus.
Ce dinosaure a été conçu en laboratoire par le Dr Wu, et est une sorte de super raptor, en plus gros. Ce n’est qu’un prototype, et avec l’ADN de Blue, les méchants comptent en faire un encore mieux, mais regardez : ils ont déjà dressé la bestiole. Avec un désignateur laser spécial, ils peuvent lui indiquer une cible. Et en appuyant sur un bouton, le Bullshitosaurus l’attaque aussitôt. Bon, là, il est en cage, mais voilà.
Ho, et pour appuyer qu’ils sont méchants, un garde (là, il y en a au moins… pfou, trois !) donne des chocs électriques au Bullshitosaurus, comme ça, pour déconner.
Mais enfin ?
Les acheteurs deviennent fous : tous veulent cet animal parce que… heu… bon. Voilà. Ça ferait bien dans le jardin, avec une grosse niche et un nom comme « Pixel » ou « Link ». Rabouin tente de calmer le jeu en rappelant qu’il n’est pas à vendre, mais alors que le public hurle « MAIS ALORS POURQUOI TU LE MONTRES, GROSSE TACHE ?« , Rabouin comprend que le prototype peut rapporter gros, alors okay, pourquoi pas.
Mais nos héros, eux, ne veulent pas voir pareil monstre dans la nature.
« Vite, il faut arrêter ça !
– En appelant la police, Owen ?
– Non, mieux : en faisant de la merde ! »
Owen retourne dans les sous-sols, va exciter le Grosstêtausaurus en lui disant qu’il n’est même pas digne de passer sur RTL malgré son nom, et le pousse ainsi à grimper dans l’ascenseur par lequel arrive les cages qui finissent aux enchères.
Ascenseur qui n’est donc pas gardé non plus, on va supposer que les autres cages y apparaissaient par magie, pif pouf, tout le manoir a sûrement été construit sur un énorme chapeau de magicien. Le Grosstêtausaurus arrive ainsi, libre, au beau milieu de la vente aux enchères, et le Grosstêtausaurus étant profondément communiste comme chacun sait (il a la tête dure), il commence à charger tous ces bourgeois millionnaires, qui s’enfuient en courant.
Les gardes, eux, se contentent de faire des bruits comme « Holala ! » et de ne pas tirer.

Francis Rabouin, constatant que l’ensemble de son service de sécurité est non seulement moins fourni qu’une brigade de police municipale, mais fait aussi moins usage de ses armes.
La dernière fois que j’ai vu des gardes armés aussi nuls, c’était dans Westworld. Ceux qui l’ont vu voient de quoi je veux parler.
Les millionnaires regagnent leurs véhicules, la soirée est un échec, et tout le monde file dans tous les sens pour se mettre à l’abri. Bientôt, ne reste plus dans la salle que le Bullshitosaurus dans sa cage, et bien évidemment, personne pour le surveiller on essayer de prendre en main la situation : tout le monde a mieux à faire. Y compris nos héros, semble-t-il.
Seulement voilà : tout ce chaos attire l’attention de Messire Schmitt, qui glandait pépère à l’extérieur du bâtiment parce que bon, il n’allait quand même pas aider. En voyant tout le monde fuir, il se précipite à l’intérieur (seul) et aperçoit le bullshitosaurus dans sa cage.
« HO BEN DIS VOIR, SI J’ENTRAIS TOUT SEUL DANS TA CAGE POUR TE VOLER UNE DENT ?«
Car oui : Messire Schmitt prend des dents… des dinosaures qu’il n’a ni capturés, ni abattus. Non mais ne cherchez pas : c’est son hobby. Sûrement que plus jeune, sa copine est partie avec un surfeur australien, alors il veut se venger en ayant un plus gros collier de dents. Ou un truc du genre. Sa plus belle prise reste une incisive de Margaraethatcherosaure, une créature qui vivait en Grande-Bretagne et faisait très peur avec ses grosses dents.
Notre homme tire tout de même une paire de fléchettes tranquillisantes sur la bête, puis rentre dans sa cage, pépère, pour essayer de lui arracher une dent.
Je vous décris le rebondissement ou bien ça ira ?
Allez, c’est bien parce que c’est vous.
HO NON ! LE BULLSHITOSAURUS NE DORMAIT PAS VRAIMENT ET LE MANGE AVANT DE QUITTER SA CAGE ET DE COMMENCER À SEMER LE CHAOS !
Quelle surprise. Non, vraiment. La dernière fois que j’ai été surpris, c’est quand la SNCF a annoncé qu’elle allait faire grève. Les trucs jamais vus, moi, ça me fait toujours un choc.
De là, tout va aller très vite, mais chaque scène va durer très longtemps.
D’abord, le bullshitosaurus mange tous les méchants à portée, avant de gagner les étages supérieurs du manoir. De son côté, Geekette, qui était enchaînée à la cage de Blue, découvre que Nerd – vous l’aviez oublié – a réussi à infiltrer le personnel du laboratoire souterrain. Il la libère donc, ainsi que Blue, pour que le raptor tabasse les rares gardes qui les embêtaient (comprendre : un seul, et juste armé d’un bâton électrique pourri, parce que pour gérer un dinosaure tueur, c’est très pratique). Mais dans la bagarre, des trucs tombent sur des machins, qui eux-même percutent des bonbonnes suspectes et une partie du laboratoire explose derrière les gentils. Pire : du gaz mortel commence à se répandre dans les sous-sols… le temps presse !
Mais surtout Blue et le bullshitosaurus sont libres.
Owen, Claire et Reloue, qui cherchaient à fuir, son arrêtés au détour d’un souterrain par Rabouin, accompagné de deux gardes.
« Aha ! Vous n’irez pas plus loin ! Donnez-moi la fille !
– Jamais !
– Vous ne savez pas ce qu’elle représente… Reloue n’est pas la petite-fille de Lockwood… c’est la clone de sa fille ! Il n’avait pas pu accepter sa disparition ! Elle est donc comme ces dinosaures ! Le fruit d’expériences génétiques !
– Oui mais je ne vois pas en quoi ça lui donne de la valeur ?
– Hé bieeeen, heu…
– Bon, vous savez quoi ? On va invoquer notre moule géante d’Arcachon et espérer que comme à chaque fois qu’on est en difficulté, un dinosaure va nous sauver le cucu. »
Et paf, pile à ce moment là, le bullshitosaurus surgit et mange les gardes armés. Décidément, tout cela est très inspiré. Nos héros fuient d’un côté, l’animal aux fesses, et Rabouin d’un autre. S’ensuit une longue course-poursuite dans tout le bâtiment, à la fin de laquelle Owen et Claire parviennent à donner à Reloue une chance de s’enfuir.
Elle monte donc se cacher dans son lit.
Hmmm. Une enfant très intelligente, donc.
La princesse est donc dans la plus haute tour du château, et la créature écailleuse monte tenter de la croquer, en passant par l’extérieur pour faire de jolis plans. Je sais, que d’originalité. Mais pile au moment où la bête va croquer Reloue et soulager le public, voici que surgit le chevalier blanc Owen… épaulé par Blue !
Owen utilise une arme trouvée sur un garde (enfin !), mais sachez-le : la peau de ce dinosaure arrête les balles.
Du coup, les gardes étaient armés avec des choses ne pouvant pas arrêter ce qu’ils devaient surveiller ? Non, vous savez quoi ? Je laisse tomber. C’est trop nul.
Reprenons l’action.
Blue saute sur le bullshitosaurus et les deux se bagarrent. Owen et Reloue fuient par les toits, et bientôt, se retrouvent sur la verrière au-dessus de la salle d’exposition du manoir Lockwood. Alors que Blue n’est guère en état de combattre plus avant.
Le bullshitosaurus s’approche lentement d’eux et…
Surgit Claire ! Qui a récupéré le laser désignateur de cible du bullshitosaurus !
Que va-t-elle désigner ? Un méchant qui passe en contrebas ? Une merde quelconque dans la salle d’exposition, comme un dinosaure factice ? Ou carrément un écureuil au fond des bois ?
Non.
Elle vise Owen.
Pardon ?
Et pousse le bouton pour déclencher l’attaque.
QUOI ?!
La bestiole attaque, Owen fait une roulade magique pour esquiver, le bullshitosaurus se retrouve à tomber sur la verrière, et avec un petit coup de main de Blue, la vilaine bête tombe et s’empale sur les cornes d’un crâne de tricératops exposé au-dessous.

Le bullshitosaurus, où l’idée géniale de proposer aux gens de venir voir un film où il est question de dinosaures, mais en fait, on va en inventer un comme ça ça n’aura aucun intérêt.
Quelle surprise, alors ! Tout se finit dans la salle d’exposition des gros squelettes de dinosaures !
Enfin. Nos héros ont gagné.
« Oh, Claire ! Comment as-tu deviné qu’en faisant m’attaquer le bullshitosaurus, je me jetterais en avant pour réaliser une esquive parfaite, et qu’il tomberait au travers de la verrière sans me faire chuter, moi ou Reloue ?
– Heu… non, moi je cherchais juste à te buter. »
Non, en fait, ce dialogue n’existe pas. En réalité, tout le monde est content et avait bien prévu des trucs improbables en se mettant d’accord par le pouvoir enchanté de la télépathie. Formidable.
L’équipe n’a plus qu’à se regrouper avec Nerd et Geekette qui expliquent que du gaz mortel est en train de se déverser dans les souterrains du manoir. Tous les dinosaures qui y sont vont donc mourir et disparaître.
Claire, pleine de compassion, ouvre leurs cages mais… finalement, pas la porte menant à la liberté. Elle se refuse à libérer de tels dangers sur le monde. C’est moche, mais ils doivent mourir.
« Hé ben moi je les libère, car ils sont comme moi ! » s’exclame ce petit étron parlant qu’est Reloue.
Les dinosaures fuient par conséquent le manoir et se retrouvent à piétiner les dernières voitures garées devant le manoir, dont celle où Rabouin et ses deux gardes du corps (il en a trouvé de nouveaux en route) s’apprêtaient à embarquer en emmenant avec eux le précieux bout d’os de l’Indominatus Rex récupéré en début de film.
Évidemment, les mecs sont armés, mais quand une horde de dinosaures leur fonce dessus, ils font juste « Ouaaahoooooowolalaaaa ! » avant de se laisser piétiner/manger/attaquer sans rien faire.
En fait, je crois que je trouvais les mecs désarmés du début du film plus crédible : au moins, il y avait une raison qu’ils meurent comme des bouses sans se défendre. Là, on a l’impression que tous les gardes sont lourdement dépressifs et appellent la mort de leurs vœux.
Tout le monde meurt… sauf Rabouin qui a eu le temps de se cacher sous sa voiture. Il perd son précieux échantillon dans le piétinement jurassique, mais au moins, il est vivant.
Il ressort donc de sous la voiture et…
N’entend pas arriver un T-Rex.
Je répète, il n’entend pas arriver un animal de plusieurs tonnes.
Je vous laisse deviner ce qu’il se passe ? Plan large, le T-Rex croque le vilain, prend une pose cool et… mais oui, rugit ! Comment avez-vous deviné ? Vous êtes forts.
Le méchant est mort, Claire et Owen peuvent se rouler des patins et se remettre ensemble, Reloue peut être espiègle reloue tant qu’elle le veut, et les dinosaures sont désormais libres d’aller saccager la Californie.
On retrouve donc le professeur Malcolm, faisant un speech devant une commission du congrès où il explique que maintenant, il va falloir cohabiter avec ces bestioles, que le monde a changé, et on aperçoit les dinosaures allant de-ci de-là, ou même le mosasaurus (vous l’aviez oublié) qui n’ayant pas retrouvé le chemin de la Meuse (comme beaucoup de gens, à raison), fait le kéké près de surfeurs.
Les images ne montrent pas comment des gens se font dévorer, ou tout simplement comment les animaux se font plomber la truffe en deux minutes dans un pays où les armes sont en vente libre. Bon, après, les dinosaures ne vont pas à l’école, donc il est vrai que ça limite leurs chances de se faire tuer.
Blue, elle, a repris sa liberté, et désormais, bondit joyeusement près d’une ville américaine, sans réaliser que son espérance de vie risque d’être très limitée.
Tout est mauvais qui finit mal et…
… FIN !
« Hé bien bonsoir. Ce soir, nous recevons un acteur que vous allez reconnaître, mais dont pourtant, vous ignorez le nom. Bonsoir José.
– Bonsoir.
– José, vous êtes un T-Rex.
– Effectivement.
– Alors, ce soir, vous vouliez pousser un coup de gueule contre les clichés.
– Tout à fait. J’en ai assez d’avoir toujours le même rôle du dinosaure qui jaillit au bon moment, mange un truc et rugit. C’est à croire que je ne sais faire que ça. Je peux aussi manger des trucs sans rugir. Rugir sans manger. Surgir au mauvais moment. Et plein de combinaisons de tout cela, comme rugir au mauvais moment et surgir en mangeant. Ou jouer quantité d’autres rôles, d’ailleurs. Vous savez, j’aimerais qu’on me considère avant tout comme un acteur, vous voyez. Un saltimbanque. Pas seulement comme un dinosaure.
– Hmmm. Vous voulez dire que vous aimeriez sortir des films de dinosaures, par exemple ?
– Tout à fait. L’époque est au progrès. J’aimerais qu’il y ait un quota de T-Rex par film.
– C’est audacieux. Vous n’avez pas peur que cela… choque ?
– Eeeet voilà, le discours habituel « Puisque c’est un T-Rex, il ne peut jouer que des T-Rex ». Quel conservatisme ! Vous savez, j’ai un jeu d’acteur ! J’ai appris auprès des meilleurs ! Je connais très bien Francis Huster, et j’ai même été à ça d’avoir le rôle d’Edith Piaf pour La Môme. Avec une moumoute et une robe, j’étais méconnaissable. Et puis…
– Puis ?
– J’ai mangé le directeur de casting, et j’ai rugi. A…attendez, non, merde, ce n’est pas du tout ce que je voulais dire.
– Mais vous, en tant qu’animal, vous pensez vraiment pouvoir faire carrière ?
– Bien sûr. Il y a plein d’animaux qui font carrière. Regardez, on retrouve des chats et des chiens plein les films. Comme par hasard. D’ailleurs, vous vous souvenez des hyènes du Roi Lion ?
– Oui ?
– Maintenant, elles font carrière sur le plateau de Cyril Hanouna tous les soirs, et personne n’a l’air d’avoir à y redire.
– Alors certes José, mais n’est-ce pas le syndrome du film maudit ? N’êtes-vous tout simplement pas bloqué dans le même rôle depuis Jurassic Park premier du nom ? »
José réfléchit, croisant ses petites pattes contre son corps musclé.
« Non, d’autres ont réussi.
– Ah oui, par exemple ?
– Vous vous souvenez du gros tas de merde de tricératops qu’on voyait dans le premier film ?
– Oui ? »
José hoche la tête, sûr de lui.
« Hé bien il est devenu à lui seul toute la licence Jurassic World. Alors si lui a réussi, pourquoi pas moi ? »